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A quoi ressemblera le paysage assurantiel de demain ? Réponse avec Jean-Louis Delpérié

12 mars 2021 La Rédaction d'Assurland 908 vues

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Le secteur de l'assurance va faire face à de nombreux défis dans la décennie qui s'ouvre : intégration de nouveaux risques majeurs, concurrence des assurtech, nécéssité de se digitaliser... Jean-Louis Delpérié, Associé senior chez Exton Consulting, expert Assurance & Fintech / Innovation, évoque avec nous quelques unes de ces évolutions à attendre.

Quels principaux défis attendent les assureurs « historiques » dans la décennie à venir ?

Il y a une focale à mettre sur l'expérience client, et un rattrapage à faire vers de meilleures pratiques digitales, chez les acteurs disons « traditionnels ». Ce double travail est en marche, mais il s’agit de modèles d’entreprises établies et donc un peu plus difficiles à faire évoluer, cette transformation risque donc de prendre encore quelque temps. Les grands groupes d’assurance cherchent bien sûr à innover, on noter par exemple le lancement d’Appenin, une assurtech MRH digitale par Covéa. Les assurtech ont effectivement agi comme des révélateurs, en renouvelant les codes de l'expérience client, par davantage de pédagogie et de transparence, mais aussi par leur capacité à être à la pointe de l’innovation, en utilisant, par exemple, l'intelligence artificielle en MRH. Lemonade comme Luko se présentent également comme des entreprises disposant du label « B corp », c’est-à-dire, des acteurs engagés au plan de l’ESG (Critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Du point de vue de la défense de valeurs, les assureurs traditionnels peuvent aussi s’en inspirer pour continuer à séduire. Il y a un dernier enjeu pour les assureurs à développer des plateformes d’« open insuring » [ouverture des données clients à des services tiers] et concrétiser des partenariats B2B et B2B2C. [Business to Business to Consumer, d’entreprise à entreprise à consommateur].

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Quelles évolutions impliquent ces nouveaux défis ?

Les assureurs historiques, s’ils se digitalisent, comme ils sont partis pour le faire, devront par exemple veiller à la bonne synchronisation des interactions multicanal de leurs systèmes d’informations, pour ne pas traiter deux fois une demande venue d’un email, d’une interaction réseau social et d’un appel téléphonique, par exemple. C’est un axe important, car les assureurs historiques disposent de relativement plus de canaux de communication que les assurances purement en ligne. Avec ce sujet, viennent d’autres bouleversements que nous avons évoqués : la mise en place du digital de bout en bout, et la transformation de l'expérience client en priorité. Ensuite, il faudra sécuriser ces nouvelles interfaces digitales, être attentif à la fraude par exemple, mais aussi optimiser les services fournis aux assurés après souscription. Certaines assurances devront par ailleurs faire évoluer leurs contrats. En fonction de l'évolution des logements, par exemple, en assurance habitation, avec la couverture des panneaux photovoltaïques. Pour détourer au mieux les nouveaux risques de leurs clients, les assureurs utiliseront également sûrement de nouvelles données, notamment satellites, pour délimiter par exemple des zones d’inondation de grêles, ou de sécheresses accrues. Ce traitement plus fin des données, ou « smart pricing », fait partie des évolutions technologiques qui permettront aussi aux assureurs de demain d’ajuster plus fidèlement les cotisations au niveau du risque. 

Les assureurs devront également faire face à de nouveaux risques, et on pense d’abord au risque cyber.

Pour faire face à ces nouveaux risques, les assureurs devront d'abord se protéger eux-mêmes. Nous avons vu récemment que les assureurs, peuvent être les cibles privilégiées des cyber criminels. Cela va nécessiter des investissements importants pour renforcer la sécurité, un effort qui devra être d’autant plus important qu’ils se digitalisent. Mais les assureurs devront aussi proposer des solutions pour se couvrir face au cyber risque, et en particulier les PME et PMI envers lesquelles les attaques augmentent. Le risque cyber va devenir une nouvelle branche à part entière de l'assurance, qu'il faut développer, et en coopération avec les bons partenaires technologiques. Car, au-delà des remboursements financiers, il y a les volets prévention et assistance. Il faut trouver des partenaires capables de débloquer une situation de vol de données, puis de remettre en état le système informatique. Il n’y a qu’avec ce type de services que le coût de ce sinistre qui s’annonce majeur baissera. Le développement des véhicules connectés et objets connectés d’ici à 2030 augmentera dans les années à venir l’exposition au risque Cyber. 

Pour le moment, on a l’impression que les assureurs traditionnels peuvent résister car les assurtech se concentrent sur une niche de clients. Ne peuvent-elles séduire que des jeunes adultes à l’aise avec un smartphone ? 

Je pense qu'il n'y a pas de raison que des clients qui aient une appétence au digital ne puissent pas aller vers ces acteurs, et ce peu importe leur âge. C'est plutôt le fait d'accepter une relation digitale avec son assureur qui peut freiner certains clients, et notamment les personnes âgées. Les quinquas et les seniors qui sont suivis par des courtiers de proximité ou des agents généraux y trouvent une relation de confiance et de conseil, un accompagnement qui leur parait satisfaisant, et c’est surtout pour cette raison qu’ils n'iront pas vers ce nouveau type d'acteurs « digitaux ». Une partie du marché continuera de leur échapper pour cette raison. Ceux qui souhaitent du conseil sont prêts à payer pour cela. Mais pour l’instant, le fait d’être dans une niche n’empêche pas les assurtech d’émerger, si elles remplissent certaines conditions. Luko a atteint les 100 000 assurés MRH, Alan a aussi plus de 100 000 assurés, et génère 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Conquérir de nouveaux clients coûte cher, et il est parfois plus rentable de bien cibler son marché. Dans le cas de Luko, par exemple, il y a bien une promesse sur le prix, mais c’est surtout grâce aux valeurs qu’il véhicule qu’il souhaite coller à son marché. Le digital ne rime pas avec « low cost » mais mise plutôt sur l’expérience client et la pédagogie. Les valeurs d’éthique, de transparence, d’engagement sociétal, avec une partie des cotisations qui est reversée à des associations : tout cela parle aux jeunes adultes informés qu’il souhaite convaincre.

« A l’avenir, les couvertures qui seront les plus attractives pour les assurances seront sans doute des petits produits, comme la garantie voyage, le remboursement d’appareils nomades, l’assurance colis, le remboursement de trajets... Il y a en effet une place à prendre sur ces assurances de poches, ciblées, qui ne sont pas la priorité des gros assureurs [...] »  

Au-delà des solutions digitales, les assurtech sont également offensives sur les prix…

Dans la durée, des prix aussi bas ne peuvent pas fonctionner. Les frais de gestion ne sont qu'une petite partie de la prime d’assurance, le reste est largement utilisé pour les sinistres, et cette part-là ne peut être rognée indéfiniment. Par ailleurs, sans réseau d’agences physiques, les dépenses deviennent très fortes en frais d'acquisition, pour se faire connaître. A produit égal, je ne crois pas qu'on puisse faire du discount dans la durée. Lemonade a cette stratégie d'acquisition, elle revendique un million de clients, mais c’est une assurtech qui perd encore de l'argent. Sa stratégie est d’être offensive sur des parts de marché qu’elle vise avec l’ambition de se rentabiliser avec le temps. 

Comment expliquer que la concurrence soit plus forte, en tous cas en France, sur l’assurance habitation chez les assurtech ? 

Les assurtech habitation sont, en effet, surtout parties au départ sur de la MRH, alors que le produit harpon des assureurs traditionnels est plutôt l'assurance auto. Néanmoins l'auto n’est pas le contrat le plus simple à gérer pour des nouveaux venus : il faut par exemple constituer et gérer tout un écosystème de la réparation, avec des garages partenaires etc… Les barrières sont donc un peu plus fortes à l'entrée du marché auto, même si on trouve bien sûr des assurtech sur ce segment aussi. Mais l’habitation est un produit plus simple pour ces acteurs-là, qui ont de plus réussi à le renouveler. Luko utilise par exemple l’intelligence artificielle et les capteurs connectés, et mise beaucoup sur la prévention dans la maison pour réduire les sinistres, ainsi que sur l’expérience client. A l’avenir, les couvertures qui seront les plus attractives pour les assurances seront sans doute des petits produits, comme la garantie voyage, le remboursement d’appareils nomades, l’assurance colis, le remboursement de trajets... Il y a en effet une place à prendre sur ces assurances de poches, ciblées, qui ne sont pas la priorité des gros assureurs, car elles génèrent de petites primes et nécessitent beaucoup de gestion. Wakam, par exemple, qui est devenu un néoassureur, s'est développé grâce à sa capacité à digitaliser des produits de ce type-là avec une nouvelle plateforme digitale. Enfin, un dernier axe de développement consiste à offrir une plateforme de services plus large que les seules assurances. L’assureur Ping An, en Chine, propose par exemple une expérience client très large, avec, en plus de l’assurance santé, la réservation de médecins, d’hôpitaux… Une offre qui va au-delà du remboursement des soins. Les assurtech peuvent prendre de l'avance sur cette expérience client élargie, en s’associant à d’autres startups, qui n’ont rien à voir avec l’assurance, et montrer cette voie aux assureurs traditionnels. 

La France peut-elle être un marché important pour les assurtech à l’avenir ? Peut-on maintenir notre position actuelle ?

Il y a deux axes. Le premier est l’accès au capital. Pour croître il faut se développer, investir, se faire connaître, et, pour cela, accéder à des fonds. Pour continuer à se développer, les assurtech françaises devront en effet trouver des investisseurs coopérants. Le deuxième axe concerne le marché. Puis-je développer mes services dans le marché dans lequel je me trouve ? En ce sens, le marché français peut paraître un peu étroit, nous en revenons au problème de la « niche » de clientèle. Mais ce qui est un peu nouveau avec nos assurtech, c’est qu’elles ont souvent une ambition européenne : avec sa dernière levée de fonds 50 millions, Luko vise un développement international qu’Alan a déjà commencé. Il faut donc être capable de travailler sur un marché plus large. Wakam fait aujourd’hui plus de la moitié de son chiffre d’affaires à l'étranger, alors que c'était à l’origine une petite société d'assurance parisienne.

A quoi ressemblera le paysage assurantiel français demain ?

Demain nous pourrions avoir un paysage tripartite. Les figures incontournables de l'assurance vont d’abord demeurer en se transformant. Puis nous trouverons des sociétés mutuelles un peu plus petites, qui auront moins les moyens d'investir dans le digital et qui risquent donc d’être en perte de vitesse. Enfin, les assurtech seront les troisièmes acteurs, peut-être capables de venir « challenger » les assureurs traditionnels sur certains pays ou certains produits. Une recomposition des acteurs semble en tout cas inévitable, notamment en raison des rachats, car il est parfois plus simple de racheter une petite assurtech qui développe un nouveau système d'information que de le développer soi-même. 

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