L'Assurance maladie tire la sonnette d'alarme. Le déficit, estimé à 16 milliards d'euros pour 2025, pourrait grimper à 41 milliards d'ici 2030 sans réforme majeure. Pour enrayer cette dérive, la Caisse nationale d'Assurance maladie (Cnam) a présenté 60 propositions, parfois controversées, visant à repenser notre système de santé solidaire.
Un coup de frein sur les arrêts maladie et l'absentéisme
Entre 2019 et 2023, les dépenses d'indemnités journalières ont bondi de 27,9 %, atteignant plus de 10 milliards d'euros. Face à cette explosion, la Cnam veut encadrer plus strictement les arrêts maladie. Elle propose de limiter les prescriptions à 15 jours pour les médecins de ville et à un mois en sortie d'hospitalisation, avec un renouvellement possible par tranche de deux mois maximum. "On a des prescriptions d'arrêts de travail qui sont trop longues", a déclaré Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam.
Dès le 1er juillet, les médecins devront utiliser un formulaire sécurisé pour toute prescription papier, et les 500 plus gros prescripteurs devront réduire de 20 % leurs arrêts. À partir de septembre, les motifs d'arrêt deviendraient obligatoires.
En parallèle, l'Assurance maladie souhaite responsabiliser les employeurs à travers un système de bonus-malus sur le taux d'absentéisme. Le télétravail pourrait être prescrit pour éviter certains arrêts et les sept premiers jours d'arrêt pourraient être financés par les entreprises, accompagnés d'une journée de carence généralisée.
Repenser le modèle des affections de longue durée
Le dispositif des affections de longue durée (ALD) pèse lourd dans les finances publiques : deux tiers des dépenses de l'Assurance maladie concernent les soins remboursés à 100 % dans ce cadre. Aujourd'hui, 20 % de la population est en ALD, un chiffre qui pourrait grimper à 26 % en 2035.
Pour maîtriser cette croissance, la Cnam propose une gestion plus dynamique des entrées et sorties. Les patients en rémission ou guérison, notamment de cancers ou de maladies cardiovasculaires, pourraient sortir du dispositif, sauf rechute. "Il n'y a aucun désengagement ni de près ni de loin de l'Assurance maladie", a assuré Thomas Fatôme.
Une nouvelle catégorie de patients à risque chronique pourrait également voir le jour, avec un suivi préventif renforcé. La Cnam souhaite investir davantage dans la prévention, via la plateforme "Mon espace santé", et interdire les dépassements d'honoraires pour les actes liés aux dépistages organisés.
Médicaments, lunettes, cures thermales : des coupes ciblées
Autre levier d'économies : les dépenses pharmaceutiques. Leur hausse annuelle moyenne est passée de 0,6 % (2010-2019) à 4,2 % depuis 2020. L'Assurance maladie veut baisser les prix des médicaments jugés peu efficaces (ASMR V), dérembourser certains anticancéreux sans résultats probants, et relancer le recours aux génériques.
Les cures thermales sont également dans le viseur. Leur coût — 200 à 250 millions d'euros par an — est jugé excessif, d'autant que leur efficacité n'est pas démontrée. La Cnam souhaite donc qu'elles ne soient plus intégralement remboursées, en s'alignant sur les préconisations de la Cour des comptes.
Enfin, la fréquence de renouvellement des lunettes sans changement de correction pourrait être allongée (actuellement tous les deux ans). Les contrats responsables des complémentaires santé pourraient être recentrés sur un panier minimal, sans options ajoutées.

La rédaction d'Assurland